Chaque année, depuis 2009, la Chaire du Louvre invite un grand penseur de notre temps à poser son regard sur le musée, son histoire et ses collections. Elle est cette année confiée au philosophe Souleymane Bachir Diagne, professeur à l’université Columbia de New York, dont les travaux portent en particulier sur le dialogue des cultures et le nomadisme des œuvres d’art. À l’occasion de cinq conférences programmées du 25 novembre au 9 décembre 2024, le philosophe sénégalais tente de répondre à cette question : de quels universels le Louvre est-il le nom ?
La notion d’universel est plus que jamais débattue, en particulier lorsqu’elle est appliquée aux musées. Au Louvre, dont les collections mettent le monde en dialogue, sa pertinence mérite particulièrement d’être interrogée. C’est le sens de l’invitation faite à Souleymane Bachir Diagne à qui est confiée la Chaire du Louvre 2024.
Cette invitation fait suite à celles de Neil MacGregor en 2021 et de Pierre Singaravélou en 2022, qui avaient déjà, par leurs réflexions originales autour de la responsabilité du musée dans une société divisée ou de la dimension coloniale de l’histoire du Louvre, contribué l’un et l’autre à faire de cette Chaire un rendez-vous propre à questionner les enjeux contemporains du musée, son identité, sa fonction et son message.
Intitulée « Louvre : quels universels ? », la Chaire de cette année intervient à un moment crucial pour le musée, qui se prépare à de grands chantiers. Le Pavillon des Sessions, qui vient de fermer pour près d’un an de travaux de réaménagement, rouvrira à l’automne 2025 dans une toute nouvelle configuration qui favorisera le dialogue et les regards croisés entre les œuvres du musée du quai Branly–Jacques-Chirac, provenant d’Asie, d’Océanie, d’Afrique et des Amériques, et celles des collections du Louvre. Plus loin à l’horizon, se profilent déjà les nouveaux parcours des Antiquités romaines, des Arts de Byzance et des Chrétientés en Orient et des Arts de l’Islam, également conçus en synergie. Au cours du printemps 2025, la programmation scientifique et culturelle continuera d’interroger la « vocation universelle » du musée. Expositions, concerts, rencontres et spectacles seront l’occasion de réfléchir autrement à la mise en récit des collections : comment écrire, au Louvre, la rencontre des cultures ?
Né à Saint-Louis, au Sénégal, ancien élève de l’École normale supérieure, aujourd’hui professeur à l’université Columbia de New York, Souleymane Bachir Diagne est l’un des penseurs de l’universel, de la mutualité et de la traduction les plus reconnus à travers le monde. Spécialiste de la philosophie de l’art, telle qu’elle se manifeste en particulier chez Léopold Sédar Senghor, il défend le nomadisme des objets, qui ont, par leurs déplacements, vocation à unir.
« Il y a là une seconde voie vers l’universel : non plus l’universalisme de surplomb […] mais comme un universel latéral […], incessante mise à l’épreuve de soi par l’autre et de l’autre par soi », écrivait Merleau-Ponty en 1960. Reprenant à son compte cette vision de cultures placées « côte à côte » et non pas « les unes sur les autres », se projetant ensemble vers un horizon commun d’universalité, Souleymane Bachir Diagne propose de réfléchir aux conditions par lesquelles le Louvre peut se faire lieu d’expression de l’« universel latéral ».
Au cours de ses cinq conférences, le philosophe regardera comment les objets venus d’ailleurs ont pris racine au Louvre, s’y sont installés pour y trouver des significations nouvelles. Cette analyse le conduira à envisager le Louvre non pas comme un récit unique, qui tiendrait le reste à sa périphérie, mais comme un faisceau d’histoires enchâssées, un « récit de récits », fait d’autant de centralités qu’il y a de cultures représentées.
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« Louvre : quels universels ? »
Cinq conférences à l’auditorium Michel-Laclotte
Lundi 25 novembre à19h : La renaissance des « fétiches » en œuvres d’art
Jeudi 28 novembre à 19 h : Quand les statues et les masques parlaient la langue des dieux
Lundi 2 décembre à 19 h : Accueillir le Pavillon des Sessions et les Arts d’Islam
Jeudi 5 décembre à 19 h : La Joconde sourit aux masques sans fossette
Lundi 9 décembre à 19 h : Faire dialoguer les cultures