Tableau parmi les plus célèbres du Louvre, le Saint Jean Baptiste peint par Léonard de Vinci constitue l'un des sommets absolus du génie du maître toscan et, plus généralement, de l'art de la Renaissance. Le mystère et la grâce qui émanent de la figure de Saint Jean tout comme la science du clair-obscur n’ont jamais cessé de fasciner les millions de passionnés/personnes qui viennent l’admirer au cœur du musée le plus visité au monde. Laissé inachevé à la mort de l'artiste, ce panneau a ensuite appartenu à de très prestigieuses collections, comme celle du roi d'Angleterre, Charles Ier, puis celle du roi de France, Louis XIV, avant de rejoindre le musée du Louvre après sa création en 1793.
Léonard de Vinci, Saint Jean Baptiste. Vers 1508-1519.
Huile sur bois (noyer). 73 x 56,5 cm.
Paris, Musée du Louvre, INV. 775
© 2016 Louvre RMN-GP / Tony Querrec
Le génie de Léonard de Vinci au service d’une œuvre expérimentale.
Artiste immensément connu dont le nom résume à lui-seul le génie artistique par excellence, Léonard de Vinci (1452-1519) peignit peu. Après La Belle Ferronnière, prêtée par le Louvre en 2017, la présence d’un second tableau du maître italien au musée du Louvre Abu Dhabi constitue un véritable événement. Présenté dans l’aile 3 du Louvre Abu Dhabi consacrée aux temps modernes (XVe-XVIIIe siècles), l’huile peinte sur un panneau de bois incarnera le grand génie de la Renaissance.
Au début du XVIe siècle, à Florence en Italie, Léonard commence à peindre cette image de Jean Baptiste, le saint patron de la ville. On ignore si l’œuvre a été commandée par un amateur ou si l’artiste a lui-même choisi ce sujet. Pendant plus d’une dizaine d’années, le maître ne cesse de perfectionner les moindres détails de la composition et de parfaire la technique picturale, expérimentale et virtuose. Le tableau devient ainsi une véritable expérience artistique.
Le Saint Jean Baptiste ne quitte jamais l’artiste italien qui l’apporte avec lui en France où il s’installe en 1516, à l’invitation du roi François Ier (1494-1547). A la mort de Léonard de Vinci en 1519, le tableau est encore en partie inachevé au niveau du bras droit et de la fourrure recouvrant le corps. Acquis par le souverain français, le tableau passe vers 1630 dans la collection du roi Charles Ier d’Angleterre (1600-1649) avant d’intégrer en 1662 la collection du Louis XIV. L’œuvre demeure ensuite dans les collections royales françaises jusqu’à son entrée au Louvre, à la Révolution.
Le Saint Jean Baptiste a été restauré en 2016 par le département des Peintures du musée du Louvre. L’intervention a permis d’amincir les épaisses couches de vernis jaunis et oxydés posées après la mort de l’artiste et qui trahissaient la palette et dissimulaient les formes. La figure a ainsi retrouvé un relief sculptural, avec un mouvement de sinueuse torsion et une expression plus subtile.
Une œuvre testament sur l’ombre et la lumière.
L’intensité spirituelle du tableau réside dans le magistral jeu de clair-obscur et dans la douceur du modelé construit par une superposition de couches très fines de glacis, constitués d’huile à peine chargée de pigments. Cet effet, appelé sfumato, dans lequel Léonard de Vinci excelle, consiste à rendre les contours vaporeux afin de faire vibrer la matière picturale et ainsi d’animer la figure. Le peintre se contente de peu de couleurs – un fond noir presque abstrait et des tonalités brunes chaudes –, une économie de moyens qui magnifie la radieuse expression du visage où le sourire du messager triomphe. La représentation d’un type idéal de beauté au sourire subtil n’est pas sans rappeler d’autres œuvres du maître comme La Sainte Anne ou La Joconde (musée du Louvre). La torsion du corps, qui surgit de la pénombre, comme saisi sur l’instant, évoque la flamme délicate d’une bougie dans la nuit.
Jean est contemporain de Jésus de Nazareth, vivant humblement, retiré dans le désert. Il devint prédicateur annonçant la venue du Messie. Il pratiquait le baptême dans l’eau du fleuve Jourdain, d’où son surnom de Jean le Baptiste. Jean est une figure majeure du christianisme mais également un des prophètes de l’islam. Par la suite, Saint Jean Baptiste devint le saint patron de la ville de Florence en Italie et un sujet souvent représenté à la Renaissance, l’une des plus brillantes époques de création artistique.
Léonard de Vinci choisit de représenter Jean comme un jeune homme, portant une abondante chevelure bouclée, vêtu d’une simple peau de bête, tenant un bâton figurant une croix. Le Saint émerge de la pénombre, le visage illuminé d’un sourire doux et rassurant. Il désigne le ciel de son index pointé vers le haut. Ce geste invite à se tourner vers Dieu tandis que le sourire confiant annonce le Salut de l’âme.
Réactions
Pour Laurence des Cars, Présidente-directrice du musée du Louvre, « Le Louvre Abu Dhabi est une réalisation unique et une formidable réussite dans le monde muséal. Depuis cinq ans, ce musée fruit d’une collaboration inédite entre les Emirats Arabes Unis et la France, conquiert le cœur et l’esprit d’un public toujours plus nombreux. La célébration de cet anniversaire est une belle occasion pour le Louvre de redire sa fierté de travailler aux côtés de nos partenaires et de nous projeter ainsi vers la prochaine décennie. Je me réjouis de voir arriver au Louvre Abu Dhabi ce Saint Jean Baptiste, merveilleux chef-d’œuvre de Léonard de Vinci, qui fascine par son intensité et son apaisante beauté. On ne pouvait imaginer plus bel ambassadeur de nos valeurs. »
Pour Son Excellence Mohamed Al Mubarak, président du musée du Louvre Abu Dhabi : « L’arrivée de ce chef-d’œuvre mondialement connu du musée du Louvre souligne la spécificité et la profondeur des liens qui nous unissent depuis longtemps. Les visiteurs du Louvre Abu Dhabi ont là une occasion unique de découvrir une œuvre magnifique, qui capture un moment extraordinaire de l’Histoire et représente aujourd’hui un chapitre capital du récit de l’humanité. Alors que nous célébrerons le mois prochain les 5 ans du Louvre Abu Dhabi, nous devons également nous interroger sur la manière dont ce musée emblématique incarne l’ambition du district culturel de Saadiyat : promouvoir les connexions entre les peuples grâce au langage universel de l’histoire, de la culture et des arts.»
La présentation du Saint Jean Baptiste au musée du Louvre Abu Dhabi s’intègre dans le cadre d’une série de quatre prêts majeurs réalisés par le musée du Louvre en considération de l’extension de l’accord intergouvernemental signé le 3 décembre 2021 entre Roselyne Bachelot-Narquin, alors ministre française de la Culture, et Son Excellence Mohamed Al Mubarak, président du musée du Louvre Abu Dhabi.