Alors que les Jeux Olympiques et Paralympiques se tiendront à Paris à l’été 2024, le musée du Louvre propose d’en découvrir les origines à travers une exposition qui lève le voile sur la fabrique de l’Olympisme.
Si les premiers Jeux Olympiques modernes sont organisés à Athènes en 1896, c’est à Paris qu’ils sont créés deux ans plus tôt : cet événement sportif mondial y est né de l’imaginaire d’historiens, scientifiques, artistes et politiques, qui, au nom de la paix favorisée par la pratique du sport, ont voulu réinventer les concours de la Grèce antique.
Dans le contexte politique singulier du tout jeune Etat grec, le concept va d’emblée connaître un succès et un développement importants, portés par les premiers outils de communication modernes appliqués à la promotion sportive (trophées, affiches, reproductions, timbres…).
EXPOSITION Galerie Richelieu
Pour cette troisième tenue des Jeux Olympiques et Paralympiques à Paris en 2024, le musée du Louvre propose au public de découvrir la création des premiers JO et leurs sources iconographiques à la fin du XIXe siècle, pour mieux saisir le contexte politique et pour comprendre comment ses organisateurs ont réinventé les concours de la Grèce antique.
Les sources de cet événement mondial sont révélées avec l’exposition : outre Pierre de Coubertin, diverses personnalités françaises et grecques sont à l'initiative de la plus grande et la plus suivie de toutes les manifestations sportives. Elles sont rejointes par Émile Gilliéron (1850-1924) : dessinateur d'origine suisse, il se forme aux Beaux-Arts de Paris et fréquente le Louvre où il copie certains des chefs-d'œuvre. Installé en Grèce et nommé artiste officiel des Jeux Olympiques à Athènes de 1896 et de la Mésolympiade de 1906, il s'est inspiré des découvertes des fouilles des grands chantiers archéologiques qu’il avait couverts, pour inventer les trophées des vainqueurs. Par le biais des techniques de reproduction les plus modernes, il illustre les images servant à la communication du tout jeune État grec, notamment les timbres ou les affiches.
Grâce à un prêt exceptionnel de la Fondation Stavros Niarchos (SNF), le Louvre expose la première coupe olympique, dite coupe Bréal : conçue par l'universitaire Michel Bréal, elle fut créée par un orfèvre français pour le vainqueur de la première course de Marathon, inventée pour les JO modernes.
Aujourd’hui, 130 ans après cette première inauguration, il s’agit aussi de commémorer le centenaire des Jeux Olympiques qui se sont tenus pour la seconde fois à Paris en 1924.
Dans le cadre de la programmation culturelle des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 à Paris, l’exposition montre comment, au nom du sport, l’alliance des disciplines scientifiques que sont la philologie, l’histoire, l’histoire de l’art et l’archéologie a réussi à créer cet événement sportif mondial.
Commissariat
Alexandre Farnoux, ancien directeur de l’École française d’Athènes et professeur d'archéologie et d'histoire de l'art grec à Sorbonne Université ;
Violaine Jeammet, conservatrice générale au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines, musée du Louvre ;
Christina Mitsopoulou, archéologue à l’université de Thessalie, École française d’Athènes.
Catalogue de l’exposition
L'olympisme. Une invention moderne, un héritage antique
Par Alexandre Farnoux, ancien directeur de l’École française d’Athènes et professeur d'archéologie et d'histoire de l'art grec à Sorbonne Université ; Violaine Jeammet, conservatrice générale au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines, musée du Louvre ; Christina Mitsopoulou, archéologue à l’université de Thessalie, École française d’Athènes.
Coédition musée du Louvre éditions / Hazan
23 x 28 cm, 336 pages, 200 ill.. Prix : 45 € .
AUX RACINES ANTIQUES DE L’OLYMPISME MODERNE : une genèse franco-grecque oubliée
L’exposition se propose d’abord de lever le voile sur la création des Jeux Olympiques modernes et de valoriser le rôle joué par la France, et tout spécialement Paris, bien au-delà de la figure de Pierre de Coubertin que l’histoire a surtout retenue. Sont ainsi évoquées des figures méconnues d'historiens et d'hommes politiques comme Dimitrios Vikélas, Michel Bréal ou Spyridon Lambros. En cherchant à comprendre le sport grec à partir de l’étude des textes antiques et des témoignages archéologiques, ces historiens et érudits ont réinventé les concours de la Grèce antique.
Avec comme préoccupation centrale la paix favorisée par la pratique du sport, les initiatives du Baron Pierre de Coubertin aboutissent au congrès olympique fondateur, organisé par l’Union des sociétés françaises de sport à l'Université de la Sorbonne en juin 1894. Les premiers JO vont ainsi être organisés en 1896 à Athènes, puis en 1900 à Paris dans le cadre de l'Exposition universelle.
LA COUPE BRÉAL
L'historien, linguiste et pédagogue Michel Bréal (1832-1915), installé à Paris et présent au congrès fondateur de la Sorbonne, a souhaité faire renaître la course du marathon en s'appuyant, de manière originale, sur des sources historiques anciennes. Il est le père spirituel d'un sport moderne qui s'est imposé mondialement.
La coupe qu'il a fait faire fut offerte en 1896 au premier vainqueur de la course, le Grec Spyridon Louis ; elle est devenue le trophée olympique le plus célèbre avec une forte connotation historique et symbolique.
Réalisée à Paris par un orfèvre anonyme sur les instructions de Bréal, elle n'a jamais à ce jour été exposée dans la ville où elle fut pourtant créée. « Cette élégante œuvre d’art parisienne » (παρισιακόν κομψοτέχνημα), tel que Spyridon Lambros l'a présentée au public grec par voie de presse, constitue l'un des pivots de l'exposition.
La coupe a été acquise par la Fondation Stavros Niarchos (SNF) en 2012 et est exposée au Centre Culturel Fondation Stavros Niarchos (SNFCC), Athènes.
LOUIS EMMANUEL ÉMILE GILLIERON (1850-1924), ARTISTE OLYMPIQUE
Au cœur de cette invention se trouve l’artiste Émile Gilliéron (père), Suisse installé en Grèce depuis 1876 dont on fêtera le centenaire de la mort en 2024. Inconnu du grand public, il était pourtant le dessinateur de la famille royale et le collaborateur de nombreux archéologues, grecs et étrangers, qui ont travaillé en Grèce à la même époque. Il fut surtout l’artiste officiel des Jeux Olympiques de 1896 et de la Mésolympiade de 1906. L’exposition se propose donc de faire comprendre au public l’impact des récentes découvertes archéologiques sur les modes de communication au moment de la naissance de ces jeux.
En s'appuyant sur l'étude du fonds d'atelier récemment légué par la famille Gilliéron à l'École française d’Athènes, l'exposition présente pour la première fois les antiquités qui ont inspiré Émile Gilliéron et les confronte aux œuvres produites dans le cadre des JO modernes : timbres, affiches, cartes postales, trophées, commémoratifs.
LA FABRIQUE DE L’IMAGERIE OLYMPIQUE : récompenser les athlètes et diffuser l’image olympique
Les relations mondaines et professionnelles d’Émile Gilliéron en font le personnage clé lorsqu’il s’agit de créer une nouvelle iconographie autour de l’olympisme.
L'expérience de terrain qu'il acquiert lors de ses collaborations sur les grandes fouilles archéologiques (Acropole d’Athènes, Marathon, Béotie, Eubée etc.) lui fournit ainsi des idées et des modèles de référence qui deviennent les fondements de la nouvelle iconographie olympique. Puisant dans sa culture archéologique, il utilise toutes les techniques de reproduction (dessin, moulage, galvanoplastie, lithographie, imprimerie, photographie etc.) pour inventer trophées et visuels servant à la communication étatique, notamment les timbres. L’événement voit en effet la première émission de timbres de jeux athlétiques au monde et la naissance de la philatélie olympique.
Les sources antiques sont aussi sollicitées pour reconstituer les gestes sportifs des anciens Grecs afin de les adapter aux nouveaux jeux. Mais l’olympisme moderne, ainsi élaboré, constitue un phénomène propre au XXe siècle qui est finalement assez éloigné de ce qu’étaient les concours antiques.